jeudi 8 juillet 2010

La justice et l'Eglise catholique en Belgique

Plusieurs personnes me demandent mon avis sur "ce qui se passe" entre la justice et l'Eglise catholique en Belgique, après les perquisitions du 24 juin à Malines et la longue audition, comme témoin, du Cardinal Danneels avant-hier à la PJ de Bruxelles.
Sur le fond, évidemment, je ne sais pas précisément ce qui est recherché par les enquêteurs.
Quelques éléments, pourtant, me viennent à l'esprit :
- ce qui était une évidence il y a vingt ans ne l'est plus, à savoir que l'institution devait être protégée et que les éventuels remous suscités par les moeurs légères d'un ecclésiastique, il valait mieux n'en point trop parler. Cette évolution est bénéfique, mais elle se fait par delà les personnes et les personnalités, elle constitue un changement de société qui dépasse les acteurs eux-mêmes de la société. Je suis persuadé que, même si (ce que j'ignore, évidemment) le Cardinal a minimisé des faits à lui rapportés, comme d'autres évêques du reste à la même époque, c'est parce qu'il croyait en toute bonne foi que c'était là son devoir, comme d'autres l'ont cru à la tête d'autres institutions. La justice qui juge le passé avec des critères du présent a toujours un petit côté anachronique;

- en même temps, ceci est un bienfait pour l'institution, même si elle met à mal une personnalité remarquable du pays, pour laquelle on ne peut qu'éprouver estime et reconnaissance. Aucune institution, si noble soit-elle, ne peut se substituer au bien des personnes individuelles. La "raison d'Etat", quel que soit " l'Etat" (ou, donc, l'institution), est toujours une mauvaise raison quand le bien d'un seul individu est en jeu. Que l'Eglise, secouée par la justice du pays, en prenne conscience, voilà qui ne peut que la grandir;

- l'Eglise, du coup, se grandira comme institution si elle ressort de cette épreuve plus humble, moins arrogante et moins donneuse de leçons. Il ne faut pas s'étonner qu'une démocratie comme le Royaume de Belgique, tellement traversée par la nécessité du dialogue constant entre tous les partenaires, trouve agaçante la prétention de l'Eglise catholique de se placer sans cesse, du point de vue éthique, "au-dessus de la mêlée", comme si ce qu'elle professe devait être avalé tout cru et sans discussion. Et, en particulier, en matière de morale sexuelle : on la rattrape là, précisément là, où elle pense si souvent devoir faire la leçon à tout le monde. C'est bien pour son matricule, et ne peut que la conduire à un comportement moins ombrageux et plus évangélique.

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