samedi 16 avril 2011

Entrée dans la Semaine Sainte

Nous voici donc entrés dans la Grande et Sainte Semaine, la Semaine des plus intenses méditations, de la plus grande intériorité, du plus grand recueillement devant le mystère de la Vie, de l'Homme, de Dieu. Nous y introduit dans l'Office des Rameaux et de la Passion la lecture de l'évangile de Matthieu qui raconte la trahison, l'arrestation et la mort de Jésus jusqu'à sa mise au tombeau. Comment lire ce texte aujourd'hui et l'entendre, l'entendre vraiment, sans un arrêt sur les deux trahisons qui y sont narrées : celle de Judas, qui permet l'arrestation et va conduire le protagoniste à la désespérance et au suicide par pendaison; celle de Pierre, annoncée par Jésus luî-même, et qui, comme plus forte que lui, s'impose au premier des Apôtres, et par trois fois, et le conduira à pleurer sur sa pauvreté? Les présents événements médiatiques (trop médiatisés, d'ailleurs, et on apprend ce soir avec quelle gabegie dans les chaînes de télévision) nous mettent sous les yeux une autre trahison, d'un successeur d'Apôtre. Nous entrons dans la Semaine Sainte avec ce scandale en nos coeurs. La question devient : nous conduira-t-il, ce scandale, à la désespérance et serons-nous Judas qui se suicide, se liquide, se supprime, Judas figure non tant de la trahison mais de la mort spirituelle? Serons-nous Pierre, qui pleure? Entrer dans la Sainte Semaine, dans la Grande Semaine, en pleurant, en pleurant sur le malheur du monde, en pleurant sur notre péché, sur le péché des hommes, sur leur complicité avec le Mal qui les envahit, peut-être est-ce la seule attitude spirituelle aujourd'hui. Celle d'un coeur "contrit", comme dit le Psaume 50, mais dans le sens alors étymologique de ce terme : cor contritum, "coeur broyé", "coeur brisé", brisé de chagrin, comme on peut l'être devant l'offense faite au Juste, à l'Innocent, devant "la victime" offerte et prise en otage. En lui sont toutes les victimes. Si nous voulons l'espérance de Pâques, il faut entrer courageusement dans l'agonie que le même évangile décrit à l'orée de la Passion, la demande que "le calice" passe loin de nous. Nous ne serons pas épargnés par le Mal - l'Eglise jamais ne le fut, pauvre fille perdue, pauvre prostituée du monde, pourtant élue "Epouse" par le Christ, comme dans le Cantique admirable du Premier Testament, devenue "toute belle" par le seul regard amoureux du Bien-Aimé. Nous n'éloignerons pas le calice de la honte, nous le boirons avec le Christ. Mais alors nous serons en droit d'exiger que justice soit faite et que, précisément parce qu'Elle est l'Epouse sauvée, l'Eglise en elle fasse aussi le ménage et corresponde, sans vengeance mais avec droiture, à la dignité de ce qu'Elle devient dans la Sainte Semaine.

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