mercredi 20 mai 2015

Entre livres et jardin...

Dans la paix du soir, je vis dans mon bureau entre deux mondes. A l'intérieur, la bibliothèque : des centaines de livres, si divers par leur taille, leur forme, leur genre, leur origine - des présocratiques aux romans contemporains, des tragiques grecs aux auteurs spirituels occidentaux, des philosophes athées du XIXème siècle aux théologiens catholiques du XXème... Quel bazar! Des livres donnés, dédicacés, certains qui ont grande valeur, affective ou marchande (un texte signé Yourcenar, non pas d'elle à vrai dire mais un recueil par elle composé de citations de toutes sortes avec des photos - collées une à une, non pas imprimées - de son compagnon Jerry Wilson, à la fin de sa vie, tout cela de grand prix, mais je suis bien tranquille : qui parmi les voleurs potentiels irait le repérer? Les textes dédicacés d'Hector Bianciotti, cet écrivain académicien aujourd'hui disparu dont j'irai jeudi prochain entendre l'éloge "sous la Coupole", lorsqu'on y intronisera son successeur - aucune valeur économique, là, sans doute, mais tout le prix de l'amitié si longtemps cultivée entre nous.)
Du beau monde...
Et, si je regarde par les fenêtres du bureau, ces grandes baies si lumineuses, je suis plongé dans le jardin, qui devient magnifique. Le jardinier, cet artiste, est venu aujourd'hui encore lui donner un coup de fraîcheur, et les nuances de vert où de plus en plus éclate la tache de couleur d'une rose naissante constituent un autre univers, juste séparé par les vitres.
Des deux côtés, de la rêverie.
Des deux côtés, du travail, de la domestication - de la pensée, de la nature, peu importe.
Des deux côtés, quelque chose qui fait songer à Dieu - tout est donné par lui, tout parle de lui, mais rien ne serait sans la réponse de l'homme, sans son effort, sans son ascèse - discipline de l'écriture, de la plantation, de la taille.
Les moines, je crois, avaient - ont - pareillement besoin de ces deux univers, celui des livres et celui du jardin clos (le cloître), parce que ce sont les lieux où le cœur peut s'ouvrir.
Peut-être en va-t-il de même dans ce bureau, modeste, aux pauvres meubles, aux fauteuils malcommodes, mais où je reçois les gens qui viennent me voir. Alors, dans nos conversations, j'espère que quelque chose suinte de ces deux atmosphères qui me dépassent, qui nous dépassent, et sont comme un appel à la contemplation, entre livres et jardin...

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